
Mercenaire un jour. Mercenaire toujours.
Mercenaire. A l’évocation de ce vocable les passions se déchaînent. Pour les détracteurs de cette activité, les mercenaires sont des individus sans foi ni loi, offrant leur savoir faire au plus offrant. A l’opposé, des personnes éprises de romantisme ont les yeux de Chimène pour ces personnages porteurs d’aventures guerrières. Même si semblables aux conquistadores ils sèment parfois le chaos et la désolation.
De fait la nébuleuse mercenaire porteuse de phantasmes est mal connue. Ces hommes qui offrent la force de leurs armes contre rétribution, au profit parfois de pays fort peu démocratiques, obéissent à des motivations fort diverses.
Si l’attrait de l’argent n’est pas à récuser, il faut accepter l’idée que l’attrait de l’aventure l’emporte souvent, car de nature à sublimer une destinée. Si l’on ajoute à cela, la recherche de la montée d’adrénaline et les motivations politiques, on approche la vérité.
Bob Denard, le mercenaire le plus célèbre réfutait ce terme, au profit de ” corsaire de la république” Certes il ne possédait pas de lettres de courses à l’instar d’un Surcouf, d’un Jean Bart ou d’un Duguay-Trouin. Mais son activité fût toujours mise au service de la France. Si parfois ses changements d’alliances pouvaient dérouter, il convient de garder à l’esprit que ces prises de positions étaient suggérée par des émissaires de l’ombre.
Lorsque l’on évoque le poids de la politique sur le choix des mercenaires, on constate aisément l’omniprésence des individus proches des milieux nationalistes. Mais la gauche n’est pas en reste. Lors de la guerre d’Espagne en 1936, les brigades internationales prirent une part active dans le conflit. Elles étaient constituées dans leurs grandes majorités par des combattants marxistes. La gauche d’une pudibonderie factice nommait ces hommes, des volontaires. Ce subterfuge grossier ne trompait personne. Ces hommes étaient tout bonnement des mercenaires.
C’est ainsi que j’ai connu par le passé un garçon féru d’orthodoxie marxiste. Désireux de mettre en concordance ses idées et ses actes, il partit combattre au Nicaragua au profit des Sandinistes, farouches adversaires du capitalisme. Alors, volontaire ou mercenaire ? Alors gentil idéaliste ou grand méchant assoiffé de sang ?
Plongeons nous dans le passé. Si l’on en croit l’anabase, les dix mille mercenaires de Xénophon n’étaient pas empreints de beaucoup d’empathie. Ces guerriers grecs amoureux fous de la guerre tenaient en haute estime le butin procuré par les pillages et les massacres. Au moyen-âge, l’esprit chevaleresque n’entravait en rien les guerres intestines que se livraient les seigneurs et les rois. L’inexistence d’armée régulière obligeait les rois querelleurs à employer des troupes mercenaires. D’un emploi toujours délicat, car la paix revenu, il était souvent malaisé de les licencier. Du Guesclin à la tête des grandes compagnies fit la guerre en Espagne, dans le but de se débarrasser de ces guerriers devenus encombrants. Les lansquenets, les arbalétriers génois ou les mercenaires suisses assouvissaient le même désir d’emplir leurs escarcelles de monnaies sonnantes et trébuchantes. Au XV siècle les condottières italiens ajouteront l’appétence du pouvoir au plaisir d’acquérir des richesses. Les Sforza, les Andréa Doria; les Bartoloméo Colléoni et tant d’autres se tailleront la part du lion. Les orientations politiques d’un Garibaldi ou d’un Villebois-Mareuil forgeront leur destinée. L’un en Amérique du sud, l’autre au service des Boers combattant les anglais. La politique toujours pour un Claire Chenault et ses tigres volants contre les communistes chinois.
Mais qui sont les mercenaires contemporains ?
L’immense majorité est constituée d’anciens militaires ayant servi leur pays. Bien souvent dans des zones de guerres africaines. Les années soixante furent favorables à l’émergence de personnalités fort contrastées. Denard, Schramme, Steiner, Hoare tinrent le haut du pavé. De jeter l’anathème sur ces chiens de guerre n’est guère judicieux car ces hommes sont le reflet de leurs contemporains. Enfin qui oserait jeter l’opprobre sur les gardes suisses qui protègent le Vatican. Les années quatre vingt dix virent l’éclosion de jeunes nationalistes. Ceux-ci par idéalisme et sans esprit de lucre partirent combattre au Liban, en Croatie, en Bosnie et en Birmanie. Les mercenaires présents au Zaïre en 97 au Congo en 97 et 99 ou en Côte d’Ivoire en 2003 n’étaient que des sous-traitants de l’état français. L’Irak fut pour les compagnies américaines employant des contractors ( euphémisme pour mercenaires) une opportunité formidable pour gagner de l’argent. Plus près de nous le groupe Wagner s’implante durablement en Afrique de l’ouest. Les médias français s’offusquent de la mainmise russe sur des terres que la France a abandonné. Seul les français sont assez bêtes pour se priver des armées privées. En cause, des lois idiotes au service des droits-de-l’hommisme.